El Alcazar avant et après le siège

El alcazar de Toledo.

.....A TOLEDO, ville proche de MADRID, le 19 juillet les insurgés ont pris le dessus, mais, très rapidement le colonel MOSCARDO qui commande la place a dû se replier dans l'Alcazar où il se barricade avec 800 gardes civils, 100 officiers, 200 phalangistes, 190 cadets de l'école militaire, deux médecins et 500 femmes, dont six religieuses, avec 50 enfants qui ont demandé à s'y réfugier. ( Ils auraient enfermé aussi une centaine d'otages qui appartenaient à l'extrême gauche, ainsi que le Gouverneur Civil et toute sa famille).

TODELO était la capitale d'Espagne au Moyen-Age et elle en conserve toute sa richesse. C'est une ville superbe située sur un plateau abrupt qui surplombe la vallée du TAJO et l'ALCAZAR est une forteresse bien dégagée qui domine la ville. Carré, massif, bâti sur le roc et truffé d'énormes souterrains, ses murs de trois mètres cinquante font que les bombes lancées contre lui n'ont aucun effet. Les assiégés ont toutes les munitions nécessaires, mais ils ignorent tout ce qu'il se passe dans le reste de l'Espagne. Ils n'ont pas de lumière et sont obligés de prendre du salpêtre en guise de sel, toutefois il y a des puits dans les sous-sols et aussi des citernes. Les miliciens se heurtent à une défense farouche de la part de tireurs bien entraînés et personne n'ose donner l'assaut final. Alors on s'échange des insultes et des défis. Les assaillants, entourés d'une population profondément catholique en majorité, ne se sentent guère en sécurité et voient la trahison partout.

De leur côté, les assiégés voient leurs provisions diminuer dangereusement. Au départ, ils n'ont de vivres que pour une petite semaine, aussi leur principale préoccupation est de s'en procurer et pendant les premières nuits, des commandos vont piller les magasins et les maisons les plus proches. Mais leurs adversaires vont y mettre bon ordre et ces raids ne pourront pas se répéter longtemps.

Le 23 juillet à dix heures on rétablit les communications téléphoniques, le téléphone sonne à l'ALCAZAR. C'est un chef Républicain, CANDIDO CABELLO qui appelle le colonel MOSCARDO : -" J'ai votre fils Luis en otage, je vous donne quinze minutes pour vous rendre. Si au bout de ces quinze minutes, l'ALCAZAR ne s'est pas rendu, je le fais fusiller "-. -" D'ailleurs, je vous le passe ; il va vous parler "- Luis MOSCARDO a dix-sept ans, il prend l'appareil, sa voix tremble d'émotion :

-" Papa ?

-" Qu'y a-t-il, mon fils, qu'est-ce qu'il se passe,"-

-" Rien, papa, rien, seulement ils disent qu'ils vont me fusiller si l'ALCAZAR ne se rend pas.

-" Si c'est vrai, mon enfant, recommande ton âme à Dieu, crie " :Vive l'Espagne ! Et meurs comme un espagnol. Adieu, mon enfant, je te donne un dernier baiser.

-" Moi aussi, papa, je t'embrasse bien fort "-.

CANDIDO CABELLO reprend le récepteur.-" Alors ? "-

-" Alors rien. L'ALCAZAR ne se rendra jamais ".

Le corps de Luis MOSCARDO, fusillé à 17 ans repose maintenant à côté de celui de son père, dans la crypte de la forteresse.

Comme l'usage de la force n'a rien donné, on va essayer la ruse et le 25 juillet, la radio annonce : les derniers rebelles de l'Alcazar se sont rendus ce matin. Les gardes civils et les officiers sont sortis, désarmés, les mains derrière la tête. Le calme règne à TOLEDO.

MOSCARDO entend ces informations et il est inquiet. Il envoie un messager à MOLA pour lui dire que tout cela est faux. Le capitaine ALBA NOVAS part, en bleu de travail et une carte du parti communiste en poche. Mais, il est reconnu par hasard à BURUJON, après avoir parcouru seulement 40 kilomètres, par un de ses anciens soldats qui lui demande innocemment : -" Tiens, mon capitaine, que faites-vous là ?"- ALBA NOVAS est immédiatement fusillé.

Maintenant les assaillants ne se pressent plus. Pourquoi risquer des vies ? . La faim fera le reste. Puis ils sont maintenant 8 000, venus de MADRID principalement à bord de tous les véhicules qu'ils ont pu trouver. Mais finalement, on s'énerve, la résistance des insurgés agace au plus haut point. Il paraît que l'on arriva à tirer jusqu'à 478 obus dans la même journée. On veut épuiser les hommes, la nuit on branche des projecteurs, on lance des gaz lacrymogènes. Chaque jour, la presse reprend sa propagande. Elle cite les désertions et il est vrai qu'il y a des désertions. Ne supportant plus les privations, la fatigue, la peur 35 hommes vont déserter.

Le 17 août (1936) un avion nationaliste passe à basse altitude et lance des messages et des nouvelles fraîches. Ils répètent l'opération quand TALAVERA tombe entre leurs mains.

Les assiégés tentent encore de rapporter du ravitaillement. Une nuit ils rapportent 90 kilos de farine, une autre quelques bananes presque pourries. Une autre fois encore, du sel et du vinaigre. Presque tout ce monde vit dans les souterrains qui forment une véritable ville à l'abri des obus et des bombes, mais dans le noir complet. Seuls subsistent quelques postes de garde à l'extérieur.

Le 22 août un avion lance des boites de lait condensé, mais beaucoup seront perdues. Le 23, un message : -" Le général en chef de l'armée aux vaillants défenseurs de l'ALCAZAR : Nous vous félicitons de votre héroïque résistance . Nous nous apprêtons à vous porter assistance, nous marchons vers vous"- Le général Francisco FRANCO.

Les miliciens vont arriver à empoisonner les puits, mais il reste les citernes et les assiégés ne manqueront pas d'eau. Il en est autrement pour les vivres. On mange presque tous les chevaux puisqu'il n'en restera que six sur les 124 qu'ils comptaient au départ. Mais vivre dans l'obscurité est, paraît-il, un véritable supplice. La présence de deux médecins évite probablement les épidémies, puisqu'ils imposent des règles très strictes d'hygiène. Et on raconte des nombreux cas d'héroïsme quotidiens. Un journal est publié chaque jour, ce qui aidera considérablement les historiens dans leurs recherches. Les quelques 90 morts seront enterrés à l'extérieur. Il y aura 101 opérations chirurgicales, la plupart des amputations, sans aucune anesthésie.

Le 8 septembre on essaye de négocier. Le commandant Républicain en est l'initiateur. Un homme s'approche avec un drapeau blanc. On lui bande les yeux et on le conduit au colonel. Celui-ci a la surprise de reconnaître Vicente ROJO LLUCH qui était auparavant instructeur sur place et qui est resté au service du Gouvernement plutôt par loyauté, que par conviction politique.
Les instructions qu'il a reçues sont que les assiégés pourront sortir par petits groupes. On garantit la vie aux femmes, enfants, vieillards et des soldats. Les autres seront jugés. Le colonel répond qu'ils ne se rendront pas et que d'ailleurs, tous les présents préfèrent mourir plutôt que se rendre. Ensuite la conversation continue entre camarades. ROJO déclare qu'il ne reste pas avec eux parce que sa femme et ses enfants sont à Madrid et qu'ils se feraient fusiller en représailles. Finalement MOSCARDO demande que, s'il y a un prêtre condamné à mort, on le désigne pour partager leur sort. En partant ROJO, très ému, leur souhaite bonne chance et crie : Vive l'Espagne !

Le 11 septembre un prêtre VAZQUEZ CAMARASA est introduit dans la forteresse. Il commence des confessions, mais on lui a consenti seulement trois heures de présence, alors le prêtre décide de procéder à une confession collective. C'est un tableau dantesque: 7 à 8 cents personnes s'entassent dans des souterrains, éclairés seulement par trois chandelles que l'on a faites avec de la graisse animale. Il y a là des soldats, des femmes, des enfants, des officiers. Tous à genoux, certains avec des bandages sanglants, puis d'autres dans des brancards de fortune, une jambe, un bras amputé, chacun murmurant ses propres fautes. Puis le prêtre, à peine visible, les bras ouverts donne l'absolution collective. Après la communion la foule l'accompagne en chantant l'Ave Maria. MOSCARDO racontera: il y eu des scènes d'une telle ferveur qu'elles sont impossible à décrire.

Puis le prêtre va dire les véritables raisons de sa présence : Les convaincre de laisser sortir les femmes et les enfants. Le colonel répond que si les femmes veulent sortir, il ne les empêchera pas. On fait venir une femme choisie au hasard et le chanoine recommence ses supplications, mais la femme répond : -"Quand tous les hommes seront morts, c'est nous qui prendrons les armes. C'est nous qui défendrons l'ALCAZAR !"- C'est ce message qui sera transmis aux assiégeants.

Les Républicains savent que les secours sont en route. Il faut qu'ils attaquent autrement. Le 24 août MOSCARDO et ses compagnons entendent les perforeuses, qu'ils entendaient depuis quelques jours, se faire plus distinctes. On cherche à se rapprocher des sous-sols pour y mettre des charges de dynamite. Les jours suivants, le bruit se perçoit de plus en plus près. Une expédition nocturne est organisée pour faire échouer ce projet, la seule chose qu'elle obtient est de localiser l'endroit précis.

Tels des charognards, les journalistes étrangers sont arrivés. On imagine des vautours tournoyant au dessus d'une proie moribonde ! . Le spectacle va être beau ; il va y avoir de quoi remplir quelques colonnes !

Une entreprise française * a proposé ses services aux assaillants (il n'y a pas de petits profits) elle peut leur fournir un gaz qui liquidera les quelques 1 700 assiégés qui restent en quelques secondes. Et tout cela sans pertes humaines du côté républicain. Heureusement ceux-ci préfèreront la dynamite.

Le 18 septembre deux énormes explosions se font entendre. Une des tours d'angle et la plus grande partie de la façade se sont écroulées. Puis les tirs d'artillerie commencent. L'assaut final est donné.

Se ruant sur les décombres, escaladant les gravats, sautant d'un éboulis à l'autre, les miliciens avancent le fusil d'une main, la grenade dans l'autre. Ils arrivent dans la cour. Ils y plantent un drapeau rouge. Ils poussent un cri de victoire. Enfin l'ALCAZAR est vaincu.

Mais voici que des ruines surgissent des êtres hâves, décharnés, farouches. Ils sortent de leurs trous béants, comme des spectres de leurs tombeaux ouverts. C'est une vision d'enfer. Des corps à corps s'engagent acharnés, implacables. Chacun rivalise de férocité et de bravoure. On voulait un spectacle, le voilà. Dans le décor de CHARLES QUINT, sur les pierres écroulées, témoins de leur passé, les deux Espagnes sont en train de s'entr'égorger. L'Histoire atteint le comble de l'horreur.

Un tank, aspergé d'une bouteille d'essence enflammée doit rebrousser chemin. Le drapeau rouge est arraché, les couleurs nationales sont hissées. Peu à peu, les assaillants reculent, ils battent en retraite. Après trois heures et demie d'une lutte sauvage, les nationalistes restent maîtres du terrain.

Dans le journal "DIARIO DEL ASEDIO" tenus par les assiégés on peut trouver la note suivante : pertes de la journée : treize morts et quarante huit blessés.

Les jours suivants les uns tentent de colmater les brèches, les autres lancent de nouvelles attaques, mais l'Alcazar résiste toujours.

Quand FRANCO décide de porter secours à TOLEDO, il sait que cela peut lui coûter MADRID et, aux avertissements de ses généraux, il répond que les facteurs psychologiques et spirituels sont aussi importants, sinon plus, qu'une victoire sur le terrain et il a promis, il doit tenir parole.

Il demande alors à celui qu'il considère son meilleur général, ENRIQUE VARELA IGLESIAS de se charger de cette libération au plus vite. Le 23 septembre, un convoi de six unités de la Légion part en direction de TOLEDO en marche forcée. Le 24, les assiégés remarquent un mouvement inhabituel de véhicules. Les canons se sont tus. Ce soir même la radio portugaise annonce que les troupes Nationalistes sont arrivées. Il reste pourtant encore une trentaine de kilomètres. Le 27 les Républicains tentent une nouvelle fois un assaut avec un courage qui force l'admiration, mais ils seront, une nouvelle fois, repoussés. Dans l'après-midi des avions viennent bombarder les assiégeants. A 19 heures les premiers regulares pénètrent sur l'esplanade, les miliciens se sont enfuis, laissant derrière eux la fabrique d'armes intacte. Sortis de leurs fosses, ces spectres humains, à demi morts de faim, le corps miné par soixante-dix-huit jours d'enfer, trouvent encore des forces pour acclamer les soldats, pleurant et riant à la fois, s'embrassant et embrassant leurs libérateurs. Leur calvaire est fini !

Les vainqueurs découvriront deux pilotes nationalistes affreusement mutilés et on ne va plus faire de prisonniers. Le sang aurait coulé jusqu'aux portes de la ville. Les Marocains achevèrent tous les blessés de l'hôpital SAN JUAN et par la même occasion le médecin. Environ quarante anarchistes, bloqués dans un séminaire préférèrent y mettre le feu et mourir brûlés vifs que se faire prendre prisonniers. Pourtant MOSCARDÒ avait donné des instructions pour ne pas qu'il y ait de représailles. Il avait invité à une fraternité retrouvée. En l'an 2 000 y est-on parvenu ? Y parviendrons-nous un jour?

Le 28 septembre, le colonel MOSCARDO salue le général VARELA au garde-à-vous sur l'esplanade : "Sin novedad, mi General"

*je voudrais bien en savoir le nom! Si quelqu'un peut me le fournir je lui en serais reconnaissant.



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